La stabilisation des vins, un aperçu
Apprenez-en plus sur les différentes façons de stabiliser un vin.
Dans le précèdent article sur les troubles du vin, nous avons identifiés plusieurs composants qui peuvent causer des changements organoleptiques au niveau du goût, de la couleur et de la clarté du vin. Un des principaux mandats de l’œnologue-conseil sera de s’assurer, en collaboration avec le laboratoire, de la stabilisation du vin afin de prévenir les altérations physiques, chimiques ou microbiologiques. La mise en bouteille étant l’aboutissement de plusieurs mois de travail, il est impératif de bien gérer le risque avant le conditionnement final du vin.
La précipitation tartrique est une condition que nous rencontrons fréquemment au laboratoire étant donné le climat et le terroir québécois. Lors d’une vendange difficile, comme en 2022, il est possible et même nécessaire pour certains vignerons de recourir à des opérations de désacidification des vins sous les conseils de l’œnologue afin de réduire les taux d’acidité qui peuvent atteindre jusqu’à 20 g équivalent acide tartrique/L sans traitement. Toutefois, cette opération augmentera le risque de formation de cristaux tels le bitartrate de potassium et le tartromalate de calcium, si de fortes concentrations de carbonate de calcium sont utilisées. Les analyses en laboratoire permettent d’évaluer la probabilité de formation de cristaux de bitartrate de potassium pour ensuite estimer si un traitement préventif doit être appliqué. Il n’est pas toutefois possible de provoquer la précipitation des cristaux de tartromalate à l’heure actuelle car cette précipitation est totalement aléatoire et peut se manifester plusieurs mois après la mise en bouteille. Par contre, le laboratoire peut évaluer la concentration de calcium afin d’en évaluer le risque. Une concentration en calcium dépassant 60 mg/L pour les vins rouges et 80 mg/L pour les vins blancs augmente le risque de précipitation du tartrate de calcium.
Parmi les traitements recommandés pour stabilisation tartrique nous retrouvons le traitement au froid, l’électrodialyse, les colonnes échangeuses de cations et l’ajout d’agents inhibiteurs. Le traitement au froid du vin rendra le tartrate de potassium moins soluble et causera sa précipitation. Le vin pourra ensuite être filtré à froid pour éliminer les cristaux. Dans le processus d’électrodialyse, les ions tartriques et potassiques sont éliminés grâce à un courant électrique. Quoiqu’efficace, cette méthode aura un impact sur les propriétés organoleptiques du vin. Les colonnes échangeuses d’ions sont constituées d’une résine contenant plusieurs ions chargés. Lors du passage du vin, les ions potassium seront retenus dans la colonne ou « échangés » pour des cations comme par exemple, des ions H+. L’ajout d’agent inhibiteurs comme le carboxyméthylcellulose, les mannoprotéines ou l’acide métatartrique empêchent la formation de cristaux de bitartrate de potassium.
La stabilisation protéique vise à réduire le risque que les protéines en suspension sous forme colloïdale précipitent pour former un trouble opaque sous l’effet de la chaleur ou du pH. Ce risque de précipitation est évalué en laboratoire lors des analyses de mise. Si un risque de trouble est observé, l’œnologue procèdera à l’élaboration des tests de collage avec différentes colles afin d’éliminer les protéines problématiques. Plusieurs types de colles ont été utilisées historiquement telle la gélatine, la caséine, les blancs d’œufs et les bentonites. Ces substances ont toutes en commun une facilité à s’agglomérer avec les protéines du vin. De nouvelles colles sont désormais disponibles comme les protéines de pois, les écorces de levures et les protéines de blé. Le laboratoire détermine la dose efficace de l’agent de collage à utiliser de concert avec l’œnologue qui jugera de l’action du traitement sur les arômes du vin. Suite au traitement qui peut durer plusieurs jours, l’agent de collage sera éliminé par sédimentation ou filtration. Le vin limpide sera ensuite soutiré.
La stabilisation microbiologique consiste à évaluer non seulement le risque de contamination bactérienne ou fongique mais également le risque de refermentation en bouteille, particulièrement s’il y a présence de sucres. La stabilisation microbiologique peut s’effectuer par des techniques physiques telle la filtration sur plaques ou sur membrane, la microfiltration tangentielle et le chauffage. Les filtres à plaques étant offerts avec des porosités variables, il est possible d’effectuer des filtrations successives dégrossissantes, clarifiantes et stérilisantes. La microfiltration tangentielle consiste à faire passer le vin parallèlement à une membrane poreuse en utilisant un gradient de pression. Cette technique a l’avantage de clarifier et de stabiliser le vin sans affecter ses propriétés organoleptiques. Toutefois, elle nécessite un investissement important. Les vins peuvent également être stabilisés par la chaleur grâce à la pasteurisation. Lors de ce processus, le liquide est chauffé quelques minutes à une température suffisamment élevée pour détruire les microorganismes (entre 60 et 70oC). L’efficacité de la pasteurisation dépend du type et de la quantité de microorganismes présents. Elle aura, par contre, un effet néfaste sur certains arômes du vin. Afin d’atténuer ce problème, il est possible d’effectuer une « flash-pasteurisation » qui consiste à chauffer le vin à 72oC pendant une vingtaine de seconde. Cette méthode est particulièrement adaptée aux vins sucrés et aux vins rouges contenant de l’acide malique et très peu sulfités. Par contre, les vins doivent être déjà stables à la chaleur. L’utilisation de hautes pressions est une méthode innovatrice mais peu utilisée vue son coût. Elle consiste à exposer le vin à froid à des pressions de 100 à 600 méga pascals. Dans cette situation, les membranes des microorganismes sont fragilisées ce qui entraîne l’inactivation des levures et bactéries. La température basse a l’avantage de préserver les arômes.
La stabilisation colorimétrique vise à préserver la couleur du vin rouge, qui peut s’altérer avec le temps sous l’effet de l’oxydation ou de la réduction. Pour cela, on peut utiliser plusieurs procédés : l’ajout d’antioxydants, comme le dioxyde de soufre ou l’acide ascorbique, qui empêchent l’oxydation des pigments du vin ; l’ajout de tanins, qui stabilisent les pigments par des liaisons complexes ; la micro-oxygénation, qui consiste à introduire de l’oxygène dans le vin de manière contrôlée pour favoriser la polymérisation des tanins et des pigments.
La stabilisation des vins est un ensemble de pratiques qui visent à garantir la qualité et la durabilité du vin après sa mise en bouteille. Elle nécessite une bonne connaissance des facteurs physico-chimiques et microbiologiques qui influencent le vin et des techniques adaptées à chaque type de vin et à chaque objectif. N’hésitez pas à vous faire accompagner par le laboratoire OENOSCIENCE et votre œnologue dans cette étape cruciale de production.
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La mise en bouteille est une étape importante. Afin d’éviter les problèmes post-embouteillage, le laboratoire peut vous aider à identifier les troubles et trouver des correctifs nécessaires en collaboration avec votre œnologue.